Jem Southam et Patrice Balvay / Rockfalls in Normandy / Médusés

Pour sa première exposition La Forme présentait, grâce à la collaboration du Pôle Image Haute-Normandie, un ensemble de photographies de falaises du pays de Caux, au dessus du Havre, réalisées par Jem Southam entre 2004 et 2007. A cette vision minérale et monumentale du paysage côtier, nous avions choisi d’associer un ensemble de peintures de Patrice Balvay qui évoquent la transparence et la fluidité du monde sous-marin des méduses.

Jem Southam

C’est en 2004 que le photographe anglais Jem Southam entame la série Rockfalls in Normandy grâce au programme de résidence de création sur le thème du territoire initié par le Pôle Image Haute-Normandie. Né en 1950 à Bristol, Jem Southam vit à Exeter et enseigne la photographie à l’université de Plymouth. Depuis 1981 il a mené conjointement six importantes séries sur le paysage dont une sur les falaises, d’abord en Angleterre puis sur le littoral du pays de Caux (Bénouville, Sotteville-sur-mer, Petites Dalles, Saint-Pierre-en-Port…). L’ensemble présenté à La Forme réunissait essentiellement des très grands formats que permet l’usage d’une chambre photographique 20 x25. Les paysages de falaises que présente Jem Southam ne sont pas figés mais au contraire montrent des murs de  roches en mouvement, où les éboulements, les accidents géologiques provoqués par l’érosion des marées mais également les variations de couleurs des  strates ainsi que la lumière changeante, sculptent les parois vertigineuses. Véritables architectures de pierre, gagnées par une inexorable ruine, les falaises géantes de Jem Southam propose paradoxalement une médiation sur la fragilité de la nature.

Site web

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Jem SOUTHAM, Senneville-sur-Fécamp, « The Rockefalls of Normandy »

Patrice Balvay

Patrice Balvay est né en 1968, agrégé et titulaire du DSAP, il vit et travaille au Havre.

Médusés

En longeant les bassins, pour me rendre à mon atelier sur le port,  mon regard a suivi les méduses, avec de plus en plus d’insistance. Leurs corps translucides disparaissent et apparaissent, sans cesse, dans les eaux troubles, comme des fantômes. La contraction de leurs  ombrelles évoque irrésistiblement le clignement des yeux. Dès lors, je me suis retrouvé à voir l’œil écarquillé qui me regardait. J’en suis resté médusé. De cette expérience troublante, j’ai tiré cette suite de tableaux.Ces peintures ont ainsi été réalisées de mémoire. Le tableau, constitué de couches fines, qui laissent voir tout en recouvrant le dessous, s’est constitué lui-même comme l’émergence concrète d’un souvenir. La dilution des pigments m’a permis de trouver un équivalent pictural à l’élément liquide représenté. Le travail s’est fait à l’horizontal, les toiles posées à même le sol, comme s’il s’agissait de peindre un surface d’eau. Cependant, les toiles, retrouvant sur le mur la verticalité des modalités d’exposition, relèvent plus d’une plongée dans l’étendue liquide, que d’une une vision au ras de l’eau.Cette suite m’a conduit à utiliser une grande diversité de format –circulaire, panoramique, carré- pour renouveler les compositions, où l’œil se fixe partout et nul part à la fois.
En cherchant dans les archives du Muséum d’Histoire Naturelle du Havre, j’ai trouvé des prises de vue du fond des bassins, qui captaient, dans l’obscurité, le cycle de l’Aurelia aurita.  La genèse de cette méduse, ainsi que son développement, m’ont inspiré des gravures à l’aquatinte, qui traduisent ces métamorphoses spectrales

Patrice Balvay, le 26 octobre 2013

www.balvay.fr